C’est difficile !

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Mas Oyama travaillant au makiwara en montagne
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Kokyu ho, travail de sensibilité avec Léo Tamaki
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La précision de Kuroda Tetsuzan lors d’une démonstration de Iaï à la NAMT

Partir s’entraîner en montagne, développer sa sensibilité, la précision du kata, trois choses qui, comme tant d’autres, sont difficiles.

C’est difficile …

J’ai l’impression que d’année en année, je suis de plus en plus confronté à cette exclamation de la part des élèves et stagiaires que je côtoie tout au long de l’année.

Il est vrai qu’aujourd’hui notre société encourage le tout, tout de suite, dès que j’ai envie, comme j’ai envie. Et c’est peut-être à cause de cela que durant la pratique, beaucoup se retrouvent dans cette situation « bizarre », hors de leur zone de confort habituelle, là où le smartphone et tout autre appareil connecté n’est d’aucune utilité. Car dans la vie quotidienne, l’informatique nous diminue grandement la tache sans que l’on s’en rende vraiment compte, puisque nous y sommes aujoud’hui habitués.

– Les mails et sms permettent de communiquer très rapidement et sans se déplacer.

– Au lieu de faire des plans à la main et de devoir calculer le changement d’échelle, les plans se font informatiquement et l’échelle se calcule automatiquement par redimension de l’image en question.

– Une erreur, deux touches sur le clavier et c’est corrigé.

– Au lieu de devoir apprendre et se balader avec un dictionnaire lors d’un voyage à l’étranger, un petit tour sur le smartphone permet en quelques secondes d’avoir une traduction, ou une photo permettant de se faire comprendre immédiatement.

– Plus la peine de passer des jours ou des mois à faire des calculs à la main sur une feuille avec son crayon, il suffit de programmer la boucle dans l’ordinateur et les milliards de calculs se feront seuls, sans que l’on soit obligé d’être sans arrêt le nez dessus

– Au lieu de devoir faire une longue formation théorique et pratique, on favorise beaucoup les formations courtes (et malheureusement trop souvent bâclées) puis l’on espère de la formation continue (qui est une très bonne chose si elle est faite avec intérêt, mais qui dans les faits est souvent délaissée par les gens puisque ne rapportant plus de diplôme, plus de « gloire », rien d’autre que le simple fait d’y avoir participé).

Et comme toute chose de la vie, si les avantages sont incontestables, les inconvénients le sont malheureusement aussi.

Effectivement, si tout cela nous facilite grandement la vie, cela nous fait également perdre l’habitude et le gout de l’effort. Et malheureusement, concernant la pratique des arts martiaux, il faut apprendre avec et par le corps. Il n’existe AUCUN AUTRE MOYEN.

Alors non, les arts martiaux ne sont pas faciles. Et personne de franc et sensé ne l’a jamais dit. Mais existe t’il réellement des choses simples si l’on veut les faire avec qualité et expertise?

Oui, le départ est difficile et si vous voulez pratiquer quelque chose de qualité il faut travailler.
Oui, l’évolution sera aussi difficile puisque vous prendrez conscience de ce que vous devez corriger et améliorer pour progresser. Mais il faut être positif, si l’on s’en rend compte, c’est finalement que l’on a les cartes en main.

Oui, la ceinture noire n’est qu’un passage, une base, un baccalauréat des arts martiaux. Lorsque on devient ceinture noire, on ne reste pas moins « un adolescent » dans le domaine des arts martiaux. Et il nous faut encore grandir.

Oui, lorsqu’on devient ceinture noire, on a généralement un petit élan qui nous fait nous sentir meilleur, comme si l’on allait tout réussir (comme entre 15 et 25 ans d’ailleurs). Mais très vite si l’on est honnête avec soi, on se rend compte que le chemin est finalement beaucoup plus long.

Oui, plus l’on progresse, plus on est capable de voir nos imperfections, et surtout de les ressentir. Et plus on progresse, plus le bout du chemin s’éloigne. Ce qui peut être difficile à accepter, mais il faut passer par là. Il ne faut pas en avoir peur et au contraire être heureux de cette prise de conscience qui ne peut que nous emmener à persévérer et devenir meilleur. Est-il nécessaire de rappeler qu’il ne s’agit pas d’une course contre les autres, mais bien d’une évolution personnelle avant tout ?

Il faut donc apprendre, perfectionner, et travailler encore et encore, et encore.

Les arts martiaux ne seront jamais faciles. Il n’y en aura jamais non plus un qui sera plus facile que les autres. Ni plus efficace d’ailleurs. Personnellement je n’y crois pas.

Et si vous entendez des enseignants ou autres pratiquants qui prétendent le contraire (et généralement dénigrent les autres styles, disciplines, dojo …), soit ils ne sont pas honnêtes avec eux-mêmes, soit ils ne sont pas honnêtes avec vous, mais dans tous les cas, je vous conseille de passer votre chemin.
Personnellement, je n’ai jamais vu ou entendu parler d’un pratiquant de haut niveau (je parle de celui qui l’est, pas celui qui le dit ou le croit) qui critiquait les autres disciplines. Ils se sont d’ailleurs bien souvent essayés à plusieurs afin de perfectionner leur art. Il est évident que l’on peut remettre en cause la pratique ou la façon de faire de certains, mais nullement une discipline, puisque à mon avis, il ne suffit que de quelques minutes pour trouver des exemples de très grands pratiquants dans toutes les disciplines.

Comme on le dit souvent, ce n’est pas la discipline qui compte, mais ce que le pratiquant va en faire.

Je crois par contre que suivant la discipline, et surtout la méthode, cela peut plus ou moins nous convenir en fonction de nos attentes, de notre personnalité, et de la pédagogie de l’enseignant. Et il faut que cela nous convienne, car il faut avoir confiance à 200% en son ou ses enseignants. Puisque pour progresser, ce sera de plus en plus difficile, donc autant essayer de ne pas en plus se tromper de chemin. Il faut avoir confiance et plaisir à faire ce que l’on fait pour que l’envie de persévérer reste intacte.

Donc ne nous mentons pas. Oui il faudra travailler, oui il faudra persévérer, et oui ce sera difficile. Mais ce sera aussi un chemin qui, bien que plein d’obstacles, entraînera des rencontres et des échanges avec des gens passionnants et passionnés. Un chemin qui nous fera nous sentir mieux dans notre corps, mieux dans notre tête. Un chemin qui saura nous faire mieux appréhender et apprécier les choses de la vie. Et cela n’a pas de prix. Ou du moins il est bien supérieur à celui de votre cotisation annuelle et des quelques euros que vous dépenserez pour aller en stage vous perfectionner, et passer d’agréables moments avec des gens qui finalement, cherchent la même chose que vous.

Pour terminer je dirai que si un exercice ne vous parait pas « difficile », c’est soit que vous n’avez pas réellement conscience de tous les points importants, et que vous passez sans doute à côté, soit que l’exercice demandé n’est pas suffisamment exigeant pour vous faire progresser. C’est deux cas se retrouve fréquemment. Attention donc à savoir garder un regard objectif sur tout cela.

Le travail doit toujours avoir sa dose de difficulté. Que ce soit sur un aspect technique, physique, corporel, ou tout autre difficulté donnée par un cadre ou au contraire l’absence de cadre.
Le travail doit être difficile, mais pas impossible. C’est ainsi qu’il sera vraiment profitable pour vous… mais peut-être un peu moins pour votre ego.

Allons donc nous entraîner. N’ayons pas peur de nous tromper. N’ayons pas peur de la difficulté. Prenons plutôt conscience que chaque obstacle nous fait progresser et évoluer, que ce soit à court ou plus long terme.

Le bout du chemin, même lointain, se rapproche chaque jour un peu plus de celui qui prend la peine de l’arpenter.

Là où certains voient une montagne infranchissable, d’autres ne voient qu’un obstacle à franchir.

montagne

 

 

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