Plusieurs fois par an j’ai ce débat avec quelques personnes.

A quoi ca sert d’aller aux stages ???

Voici quelques phrases que l’on entend régulièrement dans les dojos à propos des stages :

Je ne suis pas assez bon, ce n’est pas pour moi

Les stages qui exigent un niveau avancé sont finalement assez rares. Pour ma part, j’encourage les pratiquants à aller en stage dès leur début. Cela ne peut qu’être un plus. Je ne crois pas que des parents qui verraient leur enfant vouloir lire un livre pour affiner son niveau de lecture lui refuseraient sous prétexte qu’il pourra le lire quand il aura passé son bac.
Attendre d’être « gradé » pour aller en stage, c’est peut-être le meilleur moyen de ne jamais le devenir.

Je ne connais pas cette pratique,  je ne connais pas l’intervenant

Et bien c’est justement la raison pour laquelle il faut y aller. Une fois la première approche effectuée, on sera au moins en capacité de faire le choix de continuer ou pas à s’y intéresser. Dans tous les cas, il est sûrement aussi important de savoir ce qui nous convient, que ce qui ne nous convient pas. Pour cela il faut essayer.
C’est comme les légumes quand on est petit 😉

Ca ne m’intéresse pas.

On en a le droit. Il faut juste ne pas se voiler la face et avouer ses ambitions qui à mon sens sont alors plus celles d’une pratique loisir de détente que d’un apprentissage réel. On ne peut pas dire que l’on veut étudier un art martial et ne pas vouloir apprendre plus en allant dans un stage. Comme on ne peut pas dire que l’on veut devenir ingénieur aéronautique, et ne pas vouloir suivre différents cours de physiques et de mathématiques…

Pourquoi j’irais m’entraîner avec un autre puisque mon prof est déjà très bon

Certes, par « chance » on peut être tombé dès le début sur un enseignant de grande qualité. Pour ma part, je crois qu’un enseignant de qualité encouragera toujours ses élèves à pratiquer et à se développer. Et pour cela, quel meilleur moyen que les stages.
De plus, rester figé sur la vision de son professeur, c’est comme un chercheur qui ne s’intéresserait pas aux travaux des autres. Son évolution personnelle et ses découvertes risqueraient à mon avis de ne pas atteindre ses espérances. Surtout que bien souvent, les mots prononcés ou les gestes effectués par un autre professeur pourront être un élément déclencheur dans notre pratique. Parfois, on a juste besoin que quelqu’un d’autre nous explique différemment les choses pour que le message que souhaite nous faire passer notre professeur apparaisse (enfin) comme une évidence.

Je l’ai déjà vu

Alors celle-la, j’avoue ne pas la comprendre. C’est de loin la plus absurde à mes yeux.
On ne parle pas d’un match de foot, mais de passer du temps au près de quelqu’un qui essaye de nous transmettre quelque chose.
Peut-être que ceux qui disent Je l’ai déjà vu rejoignent en fait le groupe du Ca ne m’intéresse pas ou du Pourquoi j’irais m’entraîner avec un autre puisque mon prof est déjà très bon. Mais dans ce cas, pourquoi y être déjà allé la première fois???

A mon sens, on peut dire qu’il y a deux types de stage.

• Ceux qui sont des découvertes
• Ceux qui correspondent à un vrai travail d’approfondissement personnel

Faire un stage avec quelqu’un de nouveau vous permettra toujours de découvrir quelque chose et de vous ouvrir à d’autres visions, d’autres styles, d’autres méthodes, d’autres disciplines… Et de toute façon, il faut bien une première fois. Si on n’essaie pas, on passe peut-être à côté de ce qui peut nous plaire et nous convenir. C’est exactement la même chose que lorsqu’on pousse la porte du dojo la première fois. On a souvent des idées préconçues et finalement après quelques minutes ou quelques semaines, nos idées sont déjà modifiées.

Souvent on se satisfait de ce que l’on a parce qu’on trouve ça bien. Mais si on ne va pas voir ailleurs et que l’on a rien pour comparer, il se peut que l’on soit dans l’erreur, et que l’on passe à côté de quelque chose d’intéressant, voir de mieux pour nous.

Une fois que l’on a fait un premier stage avec quelqu’un, il y a plusieurs suites possibles

1/ Le travail présenté n’intéresse pas, les principes mis en avant ne vont pas avec ceux que je souhaite mettre en avant dans ma pratique => On n’y reviendra sans doute pas.

2/ Le travail abordé m’a montré quelque chose qui me plait, mais toutefois, il n’entre pas en parfaite adéquation avec ma pratique. => J’y retournerais peut-être de temps en temps.

3/ J’affectionne particulièrement le travail en question, je pense que cela m’apportera beaucoup dans ma pratique. => Je vais essayer d’y consacrer du temps assez régulièrement afin que ceci me soit vraiment bénéfique.

Lorsque l’on est dans la situation 3, on s’intéresse donc aux stages de quelqu’un que l’on connaît, et que l’on voit plus ou moins régulièrement. C’est un choix que l’on a fait dans un second temps après une étape de découverte concluante. Ici il s’agit donc d’approfondir un travail que l’on a choisi. Un travail qui nous plait, nous convient, et dont on pense que cela nous apportera une progression et un plus dans notre pratique.
De plus, un stage c’est souvent plusieurs heures de pratique, on peut donc généralement prendre le temps de bien faire les choses, d’aller en profondeur, et de bien les ressentir. Ce qui est souvent beaucoup plus difficile lorsque l’on a en semaine des cours d’1h30 après une journée de boulot, avec une partie d’échauffement qui peut en plus réduire considérablement le temps réel de pratique.
Enfin, et cela ne gâche rien, les stages sont très souvent des moments d’échange, de partage et de convivialité entre pratiquants.

Après il est vrai que certaines disciplines ont plus une « culture » stage que d’autres. De même pour certains clubs.

Néanmoins attention, si votre club ou votre professeur vous dit de ne pas aller en stage dans tel dojo ou avec tel enseignant, voir vous l’interdit comme cela peut malheureusement arriver, il est bien évident que ce n’est pas normal. Et bien souvent, cela cache tout simplement le niveau plutôt médiocre de l’enseignant et du dojo en général.
Par contre, un professeur peut tout à fait conseiller à ses élèves d’aller à tel stage plutôt qu’à tel autre. (Et même d’une certaine façon il le doit) Ceci est tout à fait normal, puisqu’il va conseiller ce qui lui parait le plus intéressant pour le développement personnel de l’élève, sans pour autant lui interdire de voir autre chose s’il le désire.

A mon sens, un enseignant doit se ravir qu’un élève aille apprendre par lui même des choses qui l’intéressent. Tout comme un enseignant doit je pense tout faire pour que parmi ses élèves certains atteignent le plus haut niveau. Même un niveau supérieur au sien.
Personnellement je ne connais pas de parents ouvriers qui brident leur enfant à l’école par peur qu’il devienne médecin ou ingénieur. Bien au contraire. Alors pour quelle raison un professeur souhaiterait que ses élèves restent à un niveau inférieur s’ils ont la possibilité de s’épanouir et d’exceller. Ce n’est pas sérieux.
Pour ma part, j’espère vivement avoir des élèves qui auront la possibilité d’exceller. J’aurais ainsi le sentiment du devoir accompli.

Alors entraînez-vous au dojo, et n’hésitez pas à vous déplacer pour découvrir tel enseignant, tel style, telle discipline. Ne regardez pas forcement les diplômes ou les grades qui malheureusement ne sont pas toujours gage de qualité.
Renseignez-vous, et regarder plutôt ce qu’ils peuvent vous apporter.

Bonne pratique… et bons stagesssss

PS: En complément de cet article, n’hésitez pas à lire celui-ci et celui là