Une des questions de base des débutants et des non-pratiquants qui revient régulièrement dans et autour des clubs et dojos concerne l’efficacité des techniques et disciplines. A ce propos, voici donc quelques réflexions personnelles.
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Le plus efficace est ce que l’on maîtrise
Les arts martiaux ont pour objectif originel le combat. Et trop souvent à mon sens, revient sur la table, la question de la meilleure discipline, notamment pour se défendre.
Mon avis est que s’il existait une méthode supérieure, je ne crois pas qu’il y aurait autant de diversité aujourd’hui.
Il est vrai qu’à première vue, le krav maga ou le pencak silat par exemple peuvent paraître plus appropriés pour se défendre que le karaté, l’aïkido ou wing chun. Mais tout dépend du pratiquant et sa pratique réelle, pas du nom donné à celle-ci…
Au premier abord, je suis d’accord que si l’on prend deux personnes qui pratiquent réciproquement le karaté et le krav maga durant 2 ans, 2 fois par semaine, il est presque sûr que le pratiquant du krav maga se débrouillera mieux dans une situation d’agression contre une personne lambda. Et cela pour la simple raison que son travail est axé sur l’application alors que le karateka va généralement privilégier dans un premier temps des exercices dits de base. Exercices qui comme leur nom l’indique ne sont qu’un commencement et visent à bien préparer le pratiquant pour la suite. Sur un autre terrain, le karateka gagnerait peut-être, tout dépend donc du travail abordé ou pas par les pratiquants durant leurs pratiques…
Par contre, si l’on revient 30 ans plus tard, que les pratiquants ont travaillé une quantité équivalente. Avec le même sérieux et la même qualité d’enseignement. Une pratique pas systématiquement fermée sur ses forces, mais ouverte sur ce qui mettra l’élève en dehors de sa zone de confort. Je pense alors qu’il ne devrait plus y avoir de différence.
Comme j’aime à le dire, nous visons tous le sommet de la montagne. Mais plusieurs versants s’offrent à nous. A chacun donc de choisir le chemin qu’il préfère arpenter.
J’ai également tendance à dire qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise discipline. Je pourrais même dire qu’il y a autant de styles de pratique qu’il y a de professeurs, voir même de pratiquants. Au final nous faisons tous la même chose, mais différemment.
C’est pour cela qu’il ne faut pas mentir aux gens et leur dire clairement ce qu’on leur propose. Non, vous ne saurez pas vous défendre en 6 mois contre quelqu’un qui tient une arme à feu ou un couteau. Oui, s’il y a une bagarre, vous risquez de prendre des coups. Et même si vous êtes un « expert haut gradé », vous ne pourrez pas tout contrer et placer la technique que vous voulez quand vous le voudrez. C’est comme ça, et il faut l’accepter.
Par contre, avec un apprentissage et une pratique complète, vous serez mieux préparé, et surtout vous vivrez mieux. J’entends par pratique complète qu’il ne faut pas rester fermé dans une forme que l’on connaît, mais pratiquer en se mettant en difficulté si l’on veut prétendre exceller un jour dans un art qui je le rappelle est destiné au combat sans règles.
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Les étapes de la vie d’un pratiquant entraînent une efficacité différente
Intéressons-nous maintenant à différentes étapes dans la vie d’un pratiquant pouvant influencer le résultat d’une situation d’agression.
(1) Celui qui ne pratique pas peut gagner, utilisant notamment son instinct de survie.
(2) Le débutant risque de perdre car il commence généralement à prendre des « réflexes d’apprentissage » qui ne peuvent s’appliquer au combat. Il développe sa base.
(3) L’élève avancé risque de gagner, puisque son niveau lui a permit de mettre en place des « réflexes » qui s’appliquent au combat. Il commence à savoir mettre en application ce que les bases lui ont enseigné
(4) Celui qui a un long vécu sera peut-être capable de ne pas se battre, évitant ainsi de risquer de perdre. Il sait qu’il va réagir, mais est-ce que cela sera suffisant? Pourquoi prendre le risque ? Et puis être capable de vaincre, c’est aussi être capable d’épargner.
(5) Enfin, à un stade encore plus avancé, on fera en sorte de ne jamais se trouver dans une situation qui pourrait entraîner le conflit. Et c’est bien ça, la VRAIE SELF-DEFENSE.
Prenons l’exemple d’une situation probable dans un bar.
Un homme un peu nerveux et bruyant arrive. Il traverse le bar et finit par vous bousculer et s’attaquer à vous parce que vous l’avez regardé.
Pour le (1), l’instinct de survie humain aidant, il peut facilement lui rentrer dedans. Et l’issue du combat sera variée suivant les personnes.
Le (2) fait un beau blocage de base qui marchera peut-être très bien, mais ne voit pas arriver le second coup de poing qui arrive n’importe comment… Un peu caricatural je vous l’accorde, mais ça fait « Aïe ».
Le (3) bouge en faisant une parade moins académique mais repousse immédiatement l’adversaire en restant protégé. Pas le temps pour l’agresseur de développer sa seconde frappe.
Le (4) est assez sûr de lui de part son vécu. Il sait qu’il a plus de chance de gagner que de perdre. Néanmoins, il va essayer de laisser couler pour ne pas s’opposer à l’agresseur. Si celui-ci l’attaque, il va esquiver la frappe, et temporiser en essayant de calmer l’autre afin d’éviter l’affrontement.
Enfin, le (5) est observateur, il aura pris la bonne place dans le bar afin d’avoir une vue d’ensemble sans pouvoir être pris de court. Il aura donc vu l’autre arriver et aura pu réagir en changeant par exemple de place avant même que celui-ci s’approche.
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C’est quoi au juste l’efficacité
L’efficacité, c’est réussir un objectif. A ne pas confondre avec l’efficience qui va correspondre aux moyens mis en œuvre pour réussir l’objectif.
Dans l’exemple d’un combat sportif. Que je gagne 1-0, 6-5 ou 10-0, l’efficacité reste la même. L’objectif est atteint (ici la victoire). Par contre l’efficience n’est pas du tout la même.
Alors posons nous certaines questions.
Frapper fort, est-ce efficace ?
Frapper vite, est-ce efficace ?
Frapper juste, est-ce efficace ?
Mettre KO, est-ce efficace ?
Contrôler quelqu’un, est-ce efficace ?
Projeter quelqu’un, est efficace ?
Courir, est-ce efficace ?
Intrinsèquement, rien n’est efficace, rien n’est inefficace. Tout dépend de notre adaptabilité à une situation donnée.
Frapper fort, c’est bien, mais si l’autre vous touche avant cela ne sert à rien.
Toucher vite, c’est bien, mais encore faut-il être capable de toucher au bon endroit, voir d’enchaîner.
Toucher juste, c’est bien, mais si la frappe n’est pas bonne, cela n’aura que peu ou pas d’impact.
Mettre KO, c’est très bien, surtout si je n’ai pas pris de coup pour y arriver. Cependant attention à la notion de légitime défense. Mettre KO quelqu’un qui vous a mis une petite claque peut avoir d’importante conséquence pour lui, car un KO pourra entraîner des dommages corporels assez importants. Sans parler de vos probables démêlés avec la justice.
Pour éviter cela, je peux chercher à contrôler l’adversaire, ça sera très bien, mais il va se débattre, s’énerver, et à vitesse réelle il est toujours difficile de contrôler efficacement quelqu’un qui se débat. Sans oublier ses copains qui peuvent toujours se joindre à la fête…
Je peux donc choisir de le projeter pour le repousser efficacement, mais attention, s’il tombe mal, que sa colonne vertébrale ou sa tête heurte brutalement un objet ou le sol, les conséquences pour vous deux risquent d’être très importantes.
Il reste donc une dernière solution pour être efficace. Courir.
Pour apprendre à vous défendre efficacement, je vous invite donc à contacter la Fédération Française d’Athlétisme, et à copier la technique d’Usain Bolt.
Mais attention, car là aussi il y a un mais. Courir dans un bar, une boite de nuit, ou dans la rue avec le monde et les obstacles ne sera jamais chose facile. Je vous conseille donc également de pratiquer l’art du déplacement…
En faisant un parallèle avec la personne (5), rappelez-vous tout de même que la meilleure des défenses, c’est de ne pas être là.
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Pour conclure
On voit donc que se défendre n’est pas chose facile. Et à mon sens, il n’existe aucune discipline, ni un mélange de plusieurs d’ailleurs, qui ferait que l’on soit toujours sûr de faire ce qu’il faut quand il faut.
De plus, c’est un « problème » typique aux arts martiaux de venir s’entraîner pour se défendre. Car les arts martiaux, ce n’est pas que ça. Bien au contraire.
Est-ce que lorsque quelqu’un va jouer au basket avec quelques copains, il joue en pensant qu’il faut faire ceci ou cela car si un jour il se retrouve en finale des Jeux Olympique, il faudra gagner. Je ne crois pas. Alors pourquoi donc un pratiquant d’arts martiaux devrait forcement pratiquer en pensant : « si un jour je me fais agresser ».
Je ne peux que vous encourager à pratiquer, non pas sans réfléchir à la notion d’efficacité, mais sans que cela soit la raison première puisque quoi qu’il arrive, on ne sera jamais sûr de soi à 100%. Cependant, la pratique martiale vous fera naturellement progresser en ce sens, et surtout vous vous sentirez bien dans votre tête, bien dans votre corps. Et c’est bien l’essentiel. Etre efficace dans sa vie, c’est certainement et simplement cela. Et nul doute que la pratique martiale peut vous y aider.
Bonne analyse… C’est avant tout un sport avant un moyen de défense…
Je pratique le Krav depuis plusieurs années et meme si j’ai l’espoir que cela pourra me servir un jour, je le pratique surtout pour le loisir et le partage.. et biensur l’apprentissage et la decouverte de nouvelles techniques…
A force de voir des vidéos de penchak je pense essayer d’ici peu..
Mais bon j’ai tendance à penser que le Krav est vraiment bien adapté pour faire face à une agression..c’est mon avis
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Bonjour Thomas,
Heureux que l’article vous ai intéressé.
Bonne pratique à vous
Nicolas
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[…] le karaté vient de devenir sport olympique, où certains pensent que le karaté n’est pas efficace, et que d’autres s’enferment toujours plus dans des certitudes souvent […]
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